Le film nous laisse à l'extérieur car "personne ne sait", on vit tous les jours entourés de gens, de l'extérieur on se voit sans se voir, c ainsi. Nous aussi, bien que vivant un instant avec ces gosses, on est à l'extérieur car on ne peut pas s'imaginer réellement comment cette situation est possible. On passe notre temps à nous révolter, à maudire cette mère (ou ces pères, bref : quelqu'un quelque part n'a pas fait son boulot de s'occuper correctement de ces petits), à se dire qu'il y a bien quelqu'un qui va s'alarmer à un moment (sauf si on connait le fait-divers à la base de cette histoire, et qui n'a pas fait qu'un mort, si je me souviens bien. Mais si on le connait, c encore pire car on sait ces gosses condamnés et là on se retrouve dans une tragédie au sens littéral du terme, artistiquement), on hallucine, et au final on se retrouve (comme les gosses) étourdi devant la petite sur le tatami. Ne pas pleurer, parce que le film ne le demande pas (dieu merci Hollywood ne s'est pas (encore ?) emparé de cette histoire^^), il nous met en position de témoin d'une inéluctable dérive, un long enlisement, en position de voyeur, et c son côté dérangeant, perturbant, comme si on nous montrait derrière une vitre des personnes en train de se noyer. En même temps, évitant le gros pathos, il émane une pudeur (on n'a pas vraiment vu ce qui est arrivé à la petite, pas besoin), ainsi qu'une douceur permanente (pas une once de violence) qui contraste avec la dureté croissante de la vie de ces gosses, clandestins dans leur propre pays. (Alors la violence vient du système sociétal ? La violence de la démocratie ? Impensable^^)
Au passage, le pti gars Yagira Yuuya (prix d'interprêtation masculine à Cannes pour ce film) est aussi le premier rôle dans le film Shining boy and little Randy, encore une histoire vraie, très émouvante elle aussi, un film magnifique.